AM Art Films
Le Perche, 2022

Degré zéro

Enzo Mianes

Au cœur d’une forêt, Enzo Mianes s’inspire et récupère des matériaux hétéroclites pour servir sa vision archéologique des émotions.

A propos

Synopsis

Au cœur d’une forêt, Enzo Mianes s’inspire et récupère des matériaux hétéroclites pour servir sa vision archéologique des émotions. Entre abandon et accélérations temporelles, il s’attache à redonner vie aux humains et aux choses en mettant en œuvres ses découvertes.

L'artiste

Enzo Mianes est né en 1988 à Toulouse, France. Il vit et travaille à Paris et dans le Perche.
Plasticien, il est représenté par la galerie Mor & Charpentier, Paris.

Actualités

Degré zéro remporte le Prix du Meilleur court-métrage documentaire au FAF (Fine Arts Film Festival) de Los Angeles lors de l'édition 2022.

Fiche technique

Réalisation
Daniel Ablin
Image
Eric Genillier
Montage
Simon le Berre
Musique originale
Option Géniale
Durée
05:22
Sélections & Festivals
FAFF 2022 Fine Arts Film Festival

Los Angeles, USA

Fotogenia 2023

Mexico, Mexique

On Art 2022 Film Festival

Varsovie, Pologne

Chronique

Les mondes engloutis


« Les objets vivent plus longtemps,
Les objets vivent plus longtemps,
Que les gen-en-en-en-en-en-en-en-ens.
Pas toujours évidemment.
Mais souvent les objets vivent plus longtemps que les gens. »
Les Objets – Philippe Katerine.


Disparaître, voilà l’exploit divin. Mais encore faudrait-il disparaître sans rien laisser derrière soi, absolument rien qui puisse témoigner de notre passage sur Terre. Comme nous ne sommes pas Dieu mais de simples mortel.le.s, nous voilà donc condamnés à semer malgré et derrière nous, souvenirs, traces et reliques. Autant de résidus de présence humaine qui travaillent pour un long moment toutes les mémoires, qu’elles soient individuelles ou collectives, heureuses comme douloureuses. Ces fragments de vie refoulés par le temps, Enzo Mianes les glane au hasard de ses pérégrinations en prenant soin de s’attarder sur leur banalité. Une fois dans son atelier,  il les classe puis les range avec toute l’attention d’un archéologue-chiffonnier avant de les combiner au gré de l’inspiration en fétiches mémoriels.

Il n’y a pas de bonne anamnèse sans invocation des mondes engloutis par l’oubli. Pour cela, Enzo Mianes insuffle à des matériaux bruts et inorganiques tombés en disgrâce une nouvelle force vitale : le récit. Ses œuvres sont alors comme des mythes qui racontent dans un langage muet une rencontre paradoxale; celle de la présence et de l’absence, de l’intime et du commun, de l’amour et de la mort. A l’exemple de cette pièce intitulée Les Amants où un cierge, allumé aux deux extrémités, se balance tel un pendule au rythme de la cire tombante. C’est bien connu, les amants brûlent la chandelle par les deux bouts mais aucun des deux ne sait quand la flamme va s’éteindre. Célébration d’une passion enflammée tout autant que chronique de sa fin annoncée, cette œuvre prend les atours d’un autel dédié au sentiment amoureux, à sa force comme à sa fragilité.

Chez Enzo Mianes, valeurs symboliques et charges affectives propulsent l’éphémère dans l’absolu. Sa démarche ressemble donc plus à un périple cathartique où son animisme bricolé se substitue à une thérapie de choc,  où l’abandon s’y révèle être l’amorce d’une possible reconstruction plutôt que d’une éternelle séparation. Après tout «Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau » comme le disait le philosophe grecque Anaxagore. C’est cette vision magique du monde comme un infini bric‑à‑brac chaotique et précaire qu’emprunte la trinité Daniel Ablin, Eric Genillier et Simon le Berre, en offrant une cérémonie sur bande aux émotions que suscitent l’oeuvre d’Enzo Mianes.


Thomas Bernard

Thomas Bernard est né à Libourne en 1980. Chroniqueur Art pour Fluide Glacial, il est aussi commissaire d'expositions pour la Véranda et co-directeur artistique pour Ferraille Productions du festival Formula Bula, bande dessinée et plus si affinités.
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